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TROC RADIO L’accent afro-canadien
today10/04/2025
Dans un petit appartement presque vide à Saguenay, Aminata, une jeune Béninoise, observe tristement la rivière gelée par la fenêtre. Ce décor hivernal contraste avec la vision d’un avenir radieux qu’elle nourrissait en quittant le Bénin pour poursuivre des études à l’Université du Québec à Chicoutimi (UQAC). Cependant, depuis plus d’un an, cette gestionnaire des ressources humaines vit dans l’angoisse et la précarité, victime d’une arnaque à l’immigration qui l’a laissée sans espoir.
Aminata, dont le rêve était de décrocher un diplôme canadien pour assurer un meilleur lendemain à sa famille, a été escroquée par un soi-disant consultant en immigration. Séduite par des promesses alléchantes, elle a versé 7000 $ à cet individu, qui lui a présenté de faux documents pour son inscription à l’université et son immigration. Tout semblait bien se passer jusqu’à son arrivée à Montréal, où la réalité lui est brutalement tombée dessus : sa lettre d’admission était falsifiée.
En dépit de son parcours exemplaire et de son désir d’apprendre, Aminata découvre qu’elle n’est pas acceptée à l’UQAC. Comprenant qu’elle a été leurrée, elle se questionne : Comment un simple rêve peut-il se transformer en cauchemar? Elle explique : « Je lui ai fait confiance. J’ai payé ce qu’il a demandé. J’ai vidé mes économies et ma famille aussi. »
Son récit n’est pas isolé. Selon une enquête menée par nos soins, d’autres étudiants africains, attirés par les promesses de succès et de prospérité au Canada, ont également été victimes de faux consultants. Ces derniers profitent de l’angoisse et de l’ambition des jeunes en quête d’une éducation de qualité. Des témoignages révèlent que les frais demandés par ces arnaqueurs varient de 4000 à 12 000 $. Les conséquences sont lourdes, tant sur le plan financier que psychologique.
Aminata, confiante et naïve face à son avenir, s’est retrouvée isolée et désespérée. Son rêve d’une éducation de qualité s’est effondré, laissant place aux doutes et à la dépression. « Mon rêve canadien s’est transformé en cauchemar », confie-t-elle.
La situation est d’autant plus préoccupante qu’en 2023, 1500 demandes de permis d’études ont été rejetées en raison de lettres d’acceptation frauduleuses. L’UQAC est l’une des institutions touchées, avec près de 1400 étudiants d’Afrique parmi ses 2400 étudiants internationaux, témoignant ainsi de la présence croissante de ce fléau.
Cette situation soulève de nombreuses questions sur la responsabilité des institutions et des gouvernements. Alors que le Canada se veut un pays d’accueil pour les étudiants internationaux, la piètre gestion de la fraude à l’immigration et la lenteur des processus judiciaires mettent en péril l’avenir de milliers d’étudiants comme Aminata.
Bien que l’UQAC ait pris des mesures pour expulser le consultant frauduleux et aider Aminata dans ses démarches, cette dernière attend toujours une régularisation de sa situation. Elle a fait appel aux autorités canadiennes, mais se sent abandonnée. J’ai fait tout ce qu’il fallait faire. « Il faut que ces personnes-là arrêtent de vendre du rêve aux jeunes en Afrique », déclare-t-elle.
L’ambiguïté du système laisse de nombreuses victimes dans l’ombre, déchues de leurs droits, allant jusqu’à la menace d’expulsion. L’histoire d’Aminata illustre à la fois l’urgence d’une réforme du système d’immigration canadien, et la nécessité d’une prise de conscience collective sur les arnaques qui pullulent dans le milieu éducatif.
Alors que le Canada se présente comme un eldorado pour la jeunesse africaine, il est essentiel de s’attaquer au phénomène des faux consultants. Unir les efforts des gouvernements, des institutions et des étudiants pour lutter contre cette fraude est devenu une question de justice, mais aussi de dignité. La voix d’Aminata et celle de tant d’autres doivent être entendues pour qu’un jour, le rêve d’étudier à l’étranger ne se transforme plus en cauchemar.
Écrit par: Danielle Adjagboni
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